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Philippe Martinez en a terminé avec le 52e congrès de la CGT. A son actif on concèdera qu’« il a fait le job ». En tout cas, il ne s’est trouvé personne pour souhaiter le faire à sa place. C’est un peu le problème de Philippe Martinez depuis qu’en 2014, il s’est trouvé en position de succéder à Thierry Le Paon, ce qui ne figurait évidemment pas dans son « plan de carrière ».
Assurer la succession d’un secrétaire général écarté au bout de deux ans de mandat et alors qu’un scandale immobilier ébranlait la (...)

 
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    Philippe Martinez en a terminé avec le 52e congrès de la CGT. A son actif on concèdera qu’« il a fait le job ». En tout cas, il ne s’est trouvé personne pour souhaiter le faire à sa place. C’est un peu le problème de Philippe Martinez depuis qu’en 2014, il s’est trouvé en position de succéder à Thierry Le Paon, ce qui ne figurait évidemment pas dans son « plan de carrière ».

    Assurer la succession d’un secrétaire général écarté au bout de deux ans de mandat et alors qu’un scandale immobilier ébranlait la vieille maison, voilà qui n’était pas simple pour ce métallo au discours frustre et au physique ingrat. Et, là encore, on ne se bousculait pas au portillon pour prendre la place de chef. Qu’à cela ne tienne, Philippe Martinez s’y est collé. Avec une grande franchise, il admettait ne pas bien connaître ses dossiers. «  Mais j’apprendrai  », disait-il. Ce qu’il fit la première année, en même temps qu’il achevait le mandat de son prédécesseur.

    Au congrès de Marseille, en 2016, Philippe Martinez, qui briguait en réalité son premier mandat, ne déchaîna guère les foules. Mais on lui trouvait des excuses. Après tout, si la CGT en était là, c’est parce que Bernard Thibault en 2014 avait raté sa sortie. Dès cette époque, le schisme était apparu profond entre les orthodoxes qui s’opposaient à toutes les tentatives d’ouverture de la direction confédérale et cette dernière parfaitement consciente de l’impasse dans laquelle s’engagerait une CGT rétive au «  syndicalisme rassemblé  » qu’avait cherché à promouvoir Louis Viannet et crispée sur la défense des salariés à statut et des grandes entreprises.

    Certes, cette opposition n’était pas totalement nouvelle à la CGT. D’une certaine façon, c’est le même type de débat qui avait opposé Georges Séguy à Henri Krasucki en 1978. Le premier avait organisé le congrès de l’ouverture à Grenoble à l’automne 1978 après avoir demandé à Pierre Gensous, au congrès de la FSM, à Prague, en février 1978, de quitter le poste de secrétaire général de la Fédération syndicale mondiale (FSM) d’obédience communiste. Un geste hautement symbolique, visant à montrer que l’on coupait le cordon entre le syndicat et le Parti. Quelques mois après le congrès cependant, Georges Séguy, pourtant confortablement reconduit dans sa fonction de secrétaire général de la CGT, était écarté par Henri Krasucki et ce dernier avait repris des postes de responsabilités au sein de la FSM, au congrès de La Havane, en février 1982.

    L’histoire se répète donc à la CGT. Mal remise des événements de 2014, deux ans plus tard, au congrès de Marseille, la confédération avait chichement mesuré son soutien à la direction confédérale, ne votant le rapport d’activité qu’à un peu plus de 60 %. Il s’agissait toujours de sanctionner Thierry Le Paon présent physiquement au congrès. Et pas question sur les orientations d’accorder un blanc-seing à Philippe Martinez ; là encore, un tiers des syndicats avaient voté contre ou s’étaient abstenus.

    Trois ans plus tard, à Dijon, les choses se sont singulièrement compliquées pour Philippe Martinez. Cette fois, c’est bien sur son mandat et non sur les dérapages de son prédécesseur qu’il a été jugé. Or, son bilan était mauvais. Non seulement il admet que les effectifs continuent à baisser au point de faire perdre à la CGT sa première place de syndicat en France. Mais il convient que la stratégie des journées d’action à répétition s’est révélée perdante. A cela s’ajoute la perte de quelques batailles emblématiques, comme à la SNCF, mais surtout l’incapacité de la CGT à « récupérer » le combat des gilets jaunes qui obtiendront plus en quelques jours que la CGT en plusieurs années. Partant de là, il était clair que la sanction tomberait comme à Marseille, un tiers des syndicats ne votant ni le rapport d’activité ni les orientations.

    De reculade en reculade

    Les optimistes diront que Philippe Martinez a fait finalement aussi bien à Dijon qu’à Marseille. Les pessimistes auront observé qu’au-delà des votes, l’aile gauche de la CGT, composite mais active, n’a cessé de harceler la direction confédérale et de la pousser dans ses retranchements.

    • Certes, inscrire dans un amendement que la CGT doit traiter sur un même plan la Confédération européenne des syndicats (CES), la Confédération syndicale internationale (CSI) et la Fédération syndicale mondiale (FSM) qu’elle a quitté en 1995, apparaît très symbolique. Sauf que devant les journalistes de l’information sociale (Ajis) huit jours plus tôt, Philippe Martinez avait indiqué qu’il s’opposerait à ce type de disposition (voir Fil-Social n°29778).
    • De la même façon, alors que dans son rapport d’activité, le secrétaire général s’était prononcé pour une réforme des modalités de l’adhésion à la CGT admettant la possibilité de s’en remettre à côté des fédérations et des Unions locales, à des comités locaux, voire à des délégués de site, lorsque le sujet est venu en discussion dans le cadre du débat d’orientation, la direction confédérale a préféré éviter ce débat.
    • Troisième exemple illustrant le décalage entre l’équipe confédérale sortante et les syndicats, les rapports avec les autres syndicats. Dans son rapport d’activité, tout en soulignant ce qui sépare la CGT de la CFDT, Philippe Martinez avait souhaité que la CGT ne se comporte plus en «  avant-garde éclairée  », mais qu’elle travaille avec tout le monde pour peser davantage. Il suffisait d’entendre les sifflets et autres lazzis saluant le nom de Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, qui va prendre cette semaine au congrès de Vienne, la présidence de la Confédération européenne des syndicats (CES), pour comprendre que les plus radicaux de la CGT, qui incitent à un dialogue impossible avec les « gilets jaunes », ne désirent rien d’autre que rester dans leur entre-soi.

    Dans quel but ? Car si l’on refuse à la direction confédérale les moyens qu’elle préconise pour augmenter le nombre des adhésions et si on lui refuse une stratégie d’action concertée avec les autres syndicats pour infléchir les positions du patronat et du gouvernement, on voit mal comment l’équipe confédérale pourra présenter au prochain congrès, dans trois ans, des résultats en amélioration. Mais n’est-ce pas finalement ce que souhaitent les ultras de la CGT ? Mettre en difficulté la vieille CGT pour développer, avec d’autres radicaux d’autres syndicats et de partis politiques, une alternative révolutionnaire et anticapitaliste s’opposant aux politiques réformistes. Si tel est bien leur objectif, Philippe Martinez a du souci à se faire. Et d’autres dirigeants syndicaux avec lui.

    mm
  • Publié le 19 mai 2019
  • Dépèche n°29860

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