C’est un communiqué de combat que la Mutualité Française a publié ce 20 mai ! Réagissant à ce qui n’est toujours qu’un projet d’arrêté fixant les montants de la participation financière et, surtout, le niveau des frais de gestion accordés aux Ocam (voir Fil-Social n°29698), elle déclare, en effet que son « conseil d’administration considère que le nouveau dispositif de CMUC contributive tel que proposé n’améliorera pas le recours aux soins et demande à ce stade aux mutuelles de ne pas s’y engager ». En cause, principalement l’insuffisance de la rémunération accordée aux complémentaires qui prendraient en charge des bénéficiaires de cette CMUC-C.
Toujours selon le communiqué, « parce que cette réforme [de l’ACS] avait l’ambition d’une simplification des dispositifs et d’une baisse du renoncement aux soins, la FNMF avait souhaité que les mutuelles puissent s’impliquer fortement dans sa mise en œuvre ».
La Mutualité Française souhaitait alors que les bénéficiaires potentiels puissent « choisir librement d’être couvert soit par une mutuelle, comme tous les Français, soit par une caisse primaire d’Assurance Maladie ».
Pour elle, maintenant que « les modalités pratiques de sa réforme » sont connues, « le gouvernement fait le choix d’écarter les mutuelles en ne finançant pas à un niveau raisonnable la mise en œuvre ».
20 euros pour 20 contacts : insuffisant !
Pourquoi la Mutualité Française demande-t-elle aux mutuelles « de ne pas s’engager » dans la CMUC-C ?
Tout d’abord, elle estime le dispositif sous-financé (120 Millions d’euros en 2022) et « considère que 100 millions d’euros supplémentaires sont nécessaires ».
En outre, et peut-être surtout, selon elle, « les textes d’application proposent en effet une rémunération symbolique, en moyenne de 20 euros par an et par contrat pour l’accompagnement et le suivi des seuls bénéficiaires qui s’acquitteront d’une contribution... et zéro euro pour les bénéficiaires exonérés de cotisation ».
Rappelons que selon le projet d’arrêté, le niveau des frais de gestion accordés aux Ocam serait de 5 % du montant des dépenses prises en charge (voir Fil-Social n°29698)
Ce qui pour Thierry Beaudet, président de la Mutualité Française, est largement insuffisant : « La constitution du dossier et le suivi du bénéficiaire nécessitent en moyenne 20 contacts par an, dont le coût est évidemment largement supérieur à 20 euros par an. On leur refuse donc dans les faits le droit à l’accompagnement ».
En conclusion, dit-il, « les mutuelles refusent d’être contraintes de faire porter le financement des déficits à leurs autres adhérents, et notamment aux séniors. Ces derniers paieraient alors de façon injuste deux fois la réforme : par la taxe de 14% prélevée sur leurs cotisations pour financer le fonds CMUC et par un prélèvement supplémentaire sur ces mêmes cotisations pour venir compenser les déficits de gestion » des contrats CMUC –C.
Par ailleurs, un appel aux mutuelles à « rester solidaires »
Selon un message vidéo adressé aux responsables mutualistes dès la sortie du conseil d’administration de la FNMF du 16 mai, Le même Thierry Beaudet annonce, donc, que le conseil estimait qu’il était impossible aux mutuelles de s’engager dans la CMUC-C.
Il précise, en outre, que la Mutualité prendrait langue « avec celles et ceux qui sont déjà au contact de ces populations précaires, fragiles » et cite les grandes associations telles qu’ATD quart-monde et aussi les « organisations syndicales ». « Nous allons affiner nos arguments, nous allons montrer à quelles conditions nous pourrons prendre en charge les personnes les plus fragiles est essayer de réunir autour de nous des alliés qui comprendront notre position et qui pourront nous aider à la porter » explique-il ensuite.
Toujours sur ce sujet, il lance : « Le mot d’ordre de la fédération à ses mutuelles, c’est de rester solidaires ». Peut-être pense-t-il alors aux assez nombreuses décisions fédérales non suivies d’effets dans les mutuelles. On peut se souvenir, par exemple, du refus de la prise en charge du forfait hospitalier. Une décision qui n’avait pas vraiment été suivies dans les faits.
Bientôt, des éclaircissements sur les frais de gestion des mutuelles ?
Dans cette même intervention vidéo, le président de la Mutualité française lie cette question au « mutuelle bashing » (terme qu’il utilise) qui a court actuellement. Pour lui, « il faut bien comprendre que ce sujet des 5% pour l’ACS s’inscrit dans un contexte plus large où, à la demande du Président de la République, la ministre de la santé et la direction de la Sécurité sociale viennent d’ouvrir un vaste chantier de réflexion sur les frais de gestion des complémentaires ». Il redoute qu’il y ait derrière « toujours cette intention de réglementer, de réguler, d’encadrer nos frais de gestion ».
C’est pourquoi, explique-t-il, un travail est engagé sur ce dossier par la FNMF afin de faire « sortir de frais de gestion ce qui s’y trouve indûment, par exemple notre action sociale, nos actions de prévention, certains services proposés aux adhérents ». En outre, citant Solvabilité 2, il précise que sera chiffré « plus précisément le coût de gestion résultant de la réglementation ».
La question lancinante des frais de gestion des mutuelles va donc peut-être s’éclaircir.
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