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C’est sur le thème du financement du grand âge et de l’autonomie que la Mutualité Française Hauts-de-France avait décidé de débuter cette année 2020 en conviant, à Arras, mutualistes, professionnels du secteur et citoyen à débattre avec Thierry Beaudet, président de la FNMF, Annette Glowaki, présidente de l’Uriopss, Nathalie Pontasse, directrice Autonomie et Santé du Conseil départemental du Pas-de-Calais, Sylvain Lequeux, directeur de l’offre médico-sociale de l’ARS et Jean-Marie Vanlerenberghe, Sénateur et Membre de la Commission des Affaires sociales.
Philippe Wattier
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Dans son introduction, Philippe Wattier, président de la Mutualité Française Hauts-de-France retraçait rapidement les enjeux démographiques et sociaux, tout en soulignant que notre société – et nos représentants politiques - avaient, depuis plusieurs décennies, abordé la question du grand-âge, sans toutefois apporté des solutions pérennes.
Un aspect confirmé dans un premier tour de table qui a permis de mettre en exergue l’importance de la question du décloisonnement entre les différents acteurs. Ce problème, apparu dans les débats dès les années 80 est loin d’être réglé… Il prend d’autant d’importance aujourd’hui que les enjeux du grand-âge croisent les limites des finances publiques.
Annette Glowacki témoignait du rôle des quelque 1400 établissements ou services, ainsi que de leurs 40 000 collaborateurs comme véritables observateurs de la qualité de vie des personnes aidées, des aidants et des professionnels. Et de l’urgence à agir pour se donner les réponses aux problèmes actuels et à venir.
Pour Sylvain Lequeux, « l’année 2020 sera celle du grand-âge » et s’appuie sur les récentes interventions d’Agnès Buzyn. Pour le responsable de l’Agence régionale de santé, il faut être confiant dans la volonté de la ministre à traiter ce dossier. Mais lorsqu’il mettait en avant la nécessité d’amplifier la prévention, car « la dépendance n’est pas une fatalité et elle peut être diminuée bien avant qu’elle n’intervienne, notamment en agissant tôt sur des facteurs comme les maladies chroniques », les réactions ne se firent pas attendre. « J’ai 60 ans, et je n’ai rien vu de la prévention ! » s’exclamait une participante qui obligeait Nathalie Pontasse à admettre que « la communication n’est pas bonne et qu’il fallait revoir cela ».
Si tous les intervenants tombaient d’accord sur la qualité des travaux préalables, et notamment les conclusions du rapport Libault, plusieurs ne partageaient pas l’optimisme du fonctionnaire. En premier chef, Thierry Beaudet qui rappelait rapidement tous les engagements pris par les deux précédents Présidents de la République et le peu d’effets concrets si ce n’est la loi d’adaptation de la société au vieillissement « qui a fait bouger quelques lignes ».
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Pour le Président de la FNMF, une chose est cruellement claire : « on n’a plus le temps d’attendre ». Ce qui justifie pleinement à ses yeux les propositions émises l’année dernière par la FNMF et portées « par tous les acteurs de la protection sociale complémentaire ». Parmi elles, il insistait sur la redéfinition des rôles. « Il y a beaucoup de choses très bien qui sont faites, mais il manque de la cohésion ». Pour la Mutualité, une nouvelle organisation des interventions passe par une mise en réseau au niveau d’un territoire, avec un rôle pivot porté par les Ehpad. Car « si notre pays a fait il y a quelques années le choix de l’institution pour répondre à la grande dépendance, l’avenir des Ehpad se trouve au domicile... ». Il propose ainsi que les professionnels des Ehpad puissent aussi faire bénéficier de leur expertise les personnes à domicile. « J’ai bien conscience que cela à l’air d’une révolution, mais c’est indispensable » indiquait-il.
« Mais si on se limite à des questions d’organisation, les réponses aux problèmes vécus par les familles resteront des beaux discours ». Pour le responsable mutualiste, il faut des financements qui ne se limitent pas à ces questions organisationnelles, et ce sera le seul bémol qu’il apportera au Rapport Libault. « Lorsque ce rapport évoque un besoin de financement de 9 milliards par an, cela se limite à ces questions de structures et ne touche que très peu au véritable enjeu, celui du reste à charge ».
Et comme, de l’avis de tous, les finances publiques ne pourront pas tout, « notre proposition de contrats d’assurance complémentaire dépendance, combinés à la santé, permettront de faire baisser le reste à charge à un niveau plus acceptable ». Écartant par avance toute attaque sur la « marchandisation » du secteur, il précise que « naturellement, si la solidarité nationale peut répondre à elle seule aux difficultés vécues par les familles, je m’empresserais de remballer nos propositions. Mais il est vrai que je crains fort que cela n’intervienne jamais... ». Un principe et un constat que semblait bien partager Jean-Marie Vanlerenberghe : « en réalité, en faisant cotiser tout le monde, vous faites de la répartition et je trouve que c’est une excellente idée ». L’avenir des débats parlementaires nous le confirmera-t-il ?
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