L’Adom, Association des directeurs d’organismes mutualistes, en outre inter-codes (Mutualité, Assurance, Sécurité Sociale), organisait le 30 janvier une matinée sur le thème de l’insatisfaction client. L’objet en était de montrer que détecter et analyser cette insatisfaction était « une véritable opportunité pour la relation adhérents ». La réunion était organisée en partenariat avec la société Eloquant, « spécialiste de la relation client depuis 2001 ».
Pointons en premier lieu un risque mis en évidence par Alain Bouveret, directeur général de cette dernière. Selon lui, « le risque de résiliation est évoqué de plus en plus fréquemment parmi les alertes » : jusqu’à un cas sur cinq (21 %) pour les clients des mutuelles ou des assurances. Pour les mutuelles particulièrement, ce risque serait de « 17 % pour l’entreprise référence sur le secteur, contre 32 % chez la moins performante ». Entreprises qu’il n’a pas souhaité désigner précisément.
Par ailleurs, depuis 10 ans, estime-t-il, « les fondamentaux n’ont pas changé ». La première attente des clients ou adhérents envers leur assureur est la compétence. Ils jugent ensuite l’attitude du conseiller puis l’offre et les tarifs.
« L’arrivée du digital n’a pas bouleversé la donne. Ce n’est qu’un amplificateur », juge-t-il. Ce qui a changé, donc, c’est seulement le risque de résiliation. Ce qui n’est pas rien.
L’insatisfaction se nourrit de l’absence de réponse
Cependant, l’insatisfaction s’exprime, en agence, au téléphone par internet, via les réseaux sociaux, etc. Mais, toujours selon Alain Bouveret, « Le sujet de l’insatisfaction n’est pas un problème, ce qui est important, c’est la façon dont il est traité ». L’insatisfaction, en effet, « se nourrit de l’absence de réponse ».
Avis partagé par Catherine Rucki, responsable du service clients chez Henner, qui pense que « jusqu’à il y a peu, dans le monde de l’assurance, le client était captif ». Ce n’est plus le cas et particulièrement en matière de complémentaire santé où les garanties sont complexes. Quel client ou adhérent, en effet, sait précisément ce que sont et comment fonctionnent une « BR » (base de remboursement), le 100 % santé, etc. ? Pour elle, quand problème il y a, la réaction positive est de prendre la parole, d’expliquer et de s’excuser : « un client mécontent ne doit pas rester cinq jours sans nouvelles ».
Thomas Laffite, directeur relation adhérent à la Mutuelle nationale territoriale (MNT), explique, pour sa part, que dans son entreprise si, depuis trois ans, une cellule réclamations existe, un nouveau processus a été mis en place il y a quelques semaines, avec trois niveaux. Au premier niveau, les 1 200 collaborateurs détectent l’insatisfaction et peuvent consulter des experts pour aider à y répondre. Le 2e niveau est une cellule de réclamation, constituée d’experts, qui ont la capacité de déroger aux règles strictement contractuelles afin de satisfaire l’adhérent (ou la collectivité territoriale dans le cas d’espèce). Le troisième niveau est celui de la médiation.
Un impératif, pour lui, est, aussi, qu’à chaque réclamation, un appel sortant doit être émis.
Un centre de R&D gratuit
Au-delà du fait qu’un adhérent mécontent présente un risque important pour l’activité ou l’image de l’organisme, lui permettre d’exprimer son insatisfaction et, ensuite, analyser les motifs de cette insatisfaction afin de la traiter efficacement, permet souvent de convertir un détracteur en ambassadeur. Ce que résume Michèle Boyer, responsable des formations de l’Amarc (Association pour le management de la réclamation client), par la formule selon laquelle, « au-delà de satisfaire un client, il faut le faire monter aux nues ».
Ainsi également, pour Alain Bouveret, « si un client est insatisfait, il faut en profiter » pour améliorer ses offres, mieux répondre à la demande, mieux satisfaire les adhérents. En effet, pour lui, un client qui exprime une insatisfaction « demande une solution [mais] propose une solution ». Le tout avec ses mots qu’il faut savoir analyser.
Selon le directeur général d’Eloquant, le traitement adéquat et humain des réclamations est « un outil de pilotage stratégique, un outil marketing, un outil managérial et un outil opérationnel ». Bref, toutes les composantes d’une entreprise sont concernées.
C’est ce que synthétise Catherine Rucki, quand elle dit qu’il faut « transformer le pépin en pépite ». Pour elle « un centre de réclamations est un centre de R&D gratuit ».
Gilles de VeyrinasDirecteur commercial assurances et épargne retraite UMR
DR
Le mot de la fin reviendra à Gilles de Veyrinas, membre du bureau de l’Adom : « A l’origine, les mutuelles sont nées des inquiétudes des adhérents. Le traitement humain de l’insatisfaction client est un retour aux sources ».
mm