Une étude portant sur 750 millions d’ordonnance pendant le confinement et la première semaine post-confinement révèle « une profonde modification » de la consommation de médicaments, en cohérence avec la baisse enregistrée de l’activité médicale en ville.
Menée par le groupement d’intérêt scientifique (GIS) EPI-PHARE constitué par l’Ansm et la Cnam, l’étude compare, pour 58 classes thérapeutiques, le nombre de personnes ayant eu une délivrance de médicaments remboursés en pharmacie chaque semaine depuis mars 2020 au nombre “attendu” estimé sur la base de la même période en 2018 et 2019.
Premier enseignement : forte baisse de la mise en œuvre de traitements pour de nouveaux patients (-39% pour les antihypertenseurs, -48,5% pour les antidiabétiques et -49% pour les statines). Ces baisses correspondaient à plus de 100 000 patients hypertendus, 37 500 diabétiques et 70 000 personnes relevant d’un traitement par statines et non traitées. Une confirmation donc des inquiétudes émises par les professionnels de santé.
De plus, ils montrent que la très forte diminution de la délivrance de produits nécessitant une administration par un professionnel de santé, déjà décelée précédemment s’est poursuivie jusqu’à la fin du confinement et au-delà. Cette baisse concerne notamment les vaccins (-6% pour les vaccins penta/hexavalents des nourrissons, -43% pour les vaccins anti-HPV, -16% pour le ROR et -48% pour les vaccins antitétaniques la dernière semaine du confinement, cette diminution étant encore observée la semaine post-confinement) et les produits destinés aux actes diagnostiques médicaux tels que coloscopies (-62%), scanners (-38%) et IRM (-44%). Les examens non pratiqués de coloscopies (-180 000), IRM (-200 000), scanner (-375 000) indispensables pour diagnostiquer certains cancers ou maladies graves en poussée, pourraient entraîner des retards de prise en charge.
En outre, l’effondrement de l’utilisation de l’antibiothérapie (-30 à -40%), en particulier chez les enfants (- 765 000 traitements antibiotiques durant le confinement chez les 0 à 19 ans par rapport à l’attendu) a persisté pendant toute la durée du confinement et au cours de la semaine suivante, pouvant s’expliquer par un effet de l’arrêt de la circulation de tous les virus (hors SARS-Cov-2) et autres agents infectieux avec la fermeture des crèches et des établissements scolaires durant le confinement et leur réouverture partielle la première semaine post-confinement.
A l’inverse, certaines classes thérapeutiques ont vu leur utilisation augmenter en fin de confinement et lors de la première semaine de post-confinement, en particulier les hypnotiques (+6,9% la première semaine post-confinement) et à un degré moindre les anxiolytiques (+1,2% la première semaine post-confinement). Comme plusieurs enquêtes le soulignent, le confinement et ses conséquences sociales, professionnelles et économiques ont pu engendrer des troubles du sommeil et de l’anxiété. Les antidépresseurs n’étaient pas concernés par cette hausse à l’issue immédiate de la période de confinement.
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