« L’épidémie de Covid-19 avec toutes ses conséquences organisationnelles dans la filière de soins et sur la population en général a profondément déstabilisé la consommation de médicaments de ville en France », indique Epi-Phare [1], dans le quatrième volet de son étude de pharmaco-épidémiologie portant sur la dispensation de médicaments remboursés sur ordonnance en pharmacie d’officine depuis le début de l’épidémie en France.
Cette étude confirme l’idée que la crise sanitaire pourrait bien causer des aggravations dans certaines situations, et aura des impacts dont les effets reports sont difficilement quantifiables.
Ce quatrième rapport d’Epi-Phare apporte une vue globale sur l’utilisation des médicaments pendant les 8 semaines de confinement, et la période post-confinement, soit une période de 6 mois entre le 16 mars 2020 et le 13 septembre 2020. Il reflète donc l’activité du système de soins.
Le rapport indique que si la France a pu éviter une rupture de médicaments pour les pathologies chroniques déjà traitées (probablement parce que les patients ont eu le droit d’utiliser des ordonnances caduques et aussi grâce au recours aux téléconsultations), elle a connu un « déficit de mise en route des traitements, plus ou moins important selon les classes thérapeutiques » pour les nouveaux malades. Dans certains cas, la baisse enregistrée des débuts de traitement dépasse les 10 %.
« Plus inquiétant », constate Epi-phare, « on constate une diminution de délivrances de médicaments liés au traitement de pathologies lourdes et graves ». Cela concerne les médicaments associés à des greffes, l’insuffisance rénale ou de cancers. Cela reflète la baisse d’activité hospitalière sur ces maladies.
Un autre problème important est pointé par l’étude qui constate une chute, non rattrapable en 2020, de la consommation des produits pour les diagnostics médicaux par endoscopie ou par imagerie, indispensables pour diagnostiquer certains cancers ou maladies graves en poussée qui conduit, pour l’ensemble de la filière de cancérologie et de médecine de spécialité, à des retards conséquents de prise en charge.
Enfin, ce qui est assez logique compte tenu du blocage des filières hors-covid, est constatée une très forte diminution de la délivrance et de l’utilisation de produits qui nécessitent une administration par un professionnel de santé. Pour exemple, le déficit est de 75000 doses pour les injections intraoculaires traitant une dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA).
Et confirmant les craintes émises sur les effets en santé mentale du confinement, l’étude relève une augmentation très importante des anxiolytiques (+1,1 million de traitements en 6 mois par rapport à l’attendu) et des hypnotiques + 480 000 traitements délivrés pour la même période). « Cette augmentation reflète probablement l’impact psychologique important de l’épidémie de Covid-19 et de ses conséquences sociales, professionnelles et économiques », précise l’étude.
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