Alors que le déconfinement du pays s’accélère, s’ouvre déjà le débat sur une réforme du système de santé. Il se développe sur plusieurs plans. Au plan judiciaire d’abord, les plaintes s’accumulent. On ne s’y attardera pas, mais on se régale à l’avance du spectacle qui résulterait d’un grand déballage public sur les fautes commises par tel ou tel en matière de préservation de la santé des citoyens. Il n’est que de voir tous les ministres de la Santé depuis vingt ans – Xavier Bertrand, Roselyne Bachelot, Marisol (...)

 
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    Alors que le déconfinement du pays s’accélère, s’ouvre déjà le débat sur une réforme du système de santé. Il se développe sur plusieurs plans. Au plan judiciaire d’abord, les plaintes s’accumulent. On ne s’y attardera pas, mais on se régale à l’avance du spectacle qui résulterait d’un grand déballage public sur les fautes commises par tel ou tel en matière de préservation de la santé des citoyens. Il n’est que de voir tous les ministres de la Santé depuis vingt ans – Xavier Bertrand, Roselyne Bachelot, Marisol Touraine, Agnès Buzyn et Olivier Véran – se rejeter la balle sur leur imprévoyance supposée, ou celle des hauts fonctionnaires qui les entouraient et les conseillaient dans l’hypothèse d’une pandémie, pour comprendre que le juge hésitera sans doute à s’engager sur la voie d’une responsabilité pénale des politiques. Le précédent du sang contaminé en tout cas devrait inciter à la prudence.

    L’une des approches permettant de désamorcer les procès d’intention qui ne mèneraient à rien est bien sûr d’engager sans tarder la réflexion sur une remise en ordre du système de santé. En commençant par un constat, à savoir que tout n’a pas été négatif dans la crise actuelle. On a vu se mettre en place extrêmement rapidement de nouvelles modalités d’exercice des professions médicales et le directeur de la Caisse nationale d’assurance maladie entend bien profiter de cet engouement pour répondre à certains maux de notre système de santé : existence de déserts médicaux, engorgement de certains services hospitaliers, nouvelles modalités de prise en charge de certains actes… De la même façon, la coopération public-privé qui s’est rapidement établie méritera qu’on s’y arrête.

    Emmanuel Macron quant à lui a choisi de s’arrêter sur l’hôpital public. Son acte de contrition sur le sujet est d’autant plus inattendu – donc, sans doute très politique – qu’avec le déblocage de crédits publics et le plan « Ma santé 2022 », l’exécutif paraissait savoir où il allait. Sur l’hôpital en particulier, son recentrage sur les territoires via les « Groupements hospitaliers de territoire » (GHT) et une plus grande place donnée aux « hôpitaux de proximité », via les Agences régionales de santé (ARS), n’avait guère suscité d’opposition. Au cours de sa visite le 15 mai à l’hôpital La Pitié-Salpêtrière, le chef de l’État a défini les quatre axes d’une réforme de l’hôpital public : la revalorisation des salaires et des carrières des personnels, l’investissement dans les bâtiments et le matériel, la mise ne place d’une gouvernance plus souple et plus déconcentrée et une organisation du système de santé basée sur le territoire, ce dernier point visant précisément à prendre en compte les leçons de la coopération qui s’est établie, plus ou moins spontanément ces dernières semaines entre médecine hospitalière, médecine de ville et médicosocial.

    Dans la foulée du chef de l’État, Olivier Véran, ministre de la Santé a confirmé le lancement le 25 mai du « Ségur de la santé » qui portera en priorité sur la revalorisation des salaires et desserrer la contrainte des 35 heures qui, depuis le ministère de Martine Aubry, entre 1997 et 2000, a été à l’origine d’une profonde déstabilisation de l’hôpital public incapable de procéder aux embauches nécessitées par la réduction du temps de travail. «  Il ne s’agit pas d’obliger les gens à travailler davantage mais de créer un cadre plus souple pour permettre à ceux qui le souhaitent de le faire ou d’organiser leur temps de travail différemment  », l’objectif étant de porter la rémunération des infirmières au niveau moyen européen, soit 44 000 euros par an. La réorganisation du temps de travail de sera d’autant plus nécessaire que le ministre a marqué la volonté de l’exécutif de sortir du « dogme de la fermeture de lits ». Cette fois c’est un principe posé par Simone Veil entre 1993 et 1995 et soutenu par la Cour des comptes que s’engage à remettre en cause Olivier Véran.

    Quelle organisation territoriale ?

    Le changement d’orientation est réel et vise évidemment à couper l’herbe sous les pieds des oppositions et autres gilets jaunes qui déjà songent à reprendre leur place sur les ronds-points. Mais pour que la réforme proposée ait tout son sens, une autre orientation semble nécessaire, préconisée par Xavier Bertrand, ancien ministre du travail et de la Santé au moment où furent crées les Agences régionales de santé par la loi du 21 juillet 2009. Il s’en explique dans une longue interview à la revue Regards (N° 56, mars 20201) de l’Ecole nationale supérieure de sécurité sociale. L’objectif était bien à partir des anciennes agences régionales d’hospitalisation (ARH), créées par Alain Juppé en 1996, et des Directions régionales des affaires sanitaires et sociales (Drass), de mettre en place un pilotage unifié de la santé en région.

    La réforme régionale de 2015 de François Hollande, en réduisant le nombre de régions de 21 à 13, a fait perdre aux ARS qui leur étaient liées l’avantage de proximité dont elles bénéficiaient. Une approche purement organisationnelle et politique de cette réforme a conduit à d’étranges marchandages dont on citera quelques termes : pour la Normandie, le chef-lieu à Rouen contre l’ARS à Caen. Pour La Bourgogne, c’était Dijon contre Besançon. Pour l’Occitanie Toulouse contre Montpellier... Pour dire les choses autrement, ces « tripatouillages » politiciens, sans aucune considération pour les objectifs à atteindre, ont purement et simplement annulé les effets de la réforme de 2009. La conséquence en est aujourd’hui très claire : c’est parce que les ARS n’apparaissent plus un échelon pertinent en matière de sécurité sanitaire que l’on en revient avec les brigades mises en place par la Cnam à l’échelon départemental. Il ne suffit donc pas de le constater, il faut qu’au moment où se pose la question de la déconcentration de la politique hospitalière, ce sujet soit abordé. Il en va évidemment de la crédibilité d’une politique renouvelée de santé publique en France.

    mm
  • Publié le 17 mai 2020
  • Dépèche n°32942

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